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Comment promouvoir la musique algérienne ?
Entrer dans le monde
Par Réda Chikhi. El Watan. 18.06.2011

En 2007, la Fondation européenne de la culture, de passage à Alger, à l’initiative des éditions Barzakh, posait avec intérêt la question de savoir si une adéquation serait un jour possible entre culture, marché et démocratie. Depuis, à longueur d’initiatives et de contributions, des pistes ont été esquissées, alimentant le débat, sans pour autant le mener à son terme. Mais, au cœur de celui-ci, la question de la diffusion est apparue comme incontournable, autant au plan éthique (démocratie culturelle) qu’au plan stratégique (démocratisation de la culture). Il s’agit, en effet, en assurant la meilleure diffusion possible, de proposer un aboutissement aux efforts consentis et aux moyens investis. Ne serait-ce pas là le but, disons naturel, à atteindre pour un pays, qui, en une seule année (de 2009 à 2010), a vu doubler le budget alloué à la culture ?


Le parachèvement recherché consisterait à remettre en ordre de marche le triptyque «disponibilité», «accessibilité» et «exploitation». A nouveaux enjeux, nouvelles méthodes. Le nouveau mode de diffusion devrait d’abord porter sur le niveau local, sans la maîtrise duquel il serait vain d’envisager une coopération internationale valable. Il s’agit d’adopter, en premier lieu, une démarche organisée tenant compte du sens, de la substance et, par conséquent, de l’identification de ressources. Cette approche méthodique concerne toutes les disciplines artistiques et, particulièrement, la musique dont les modes de diffusion obéissent à des critères spécifiques liés aux industries culturelles qui recouvrent son domaine.


Aujourd’hui, il est reconnu que l’Algérie, à travers sa jeunesse notamment, dispose d’un formidable potentiel créatif qui embrasse une diversité surprenante de genres. Depuis le patrimoine musical jusqu’aux expressions modernes, en passant par toutes les créations qui mêlent ces sources diverses, des centaines, voire des milliers de jeunes, individuellement ou en groupe, frappent aux portes de la reconnaissance sinon de la renommée. Les médias, comme à travers l’émission de télévision «El Han Oua Chabab» ou celle de radio, «Turbo Musique7, ont pu illustrer cet élan. D’une manière ou d’une autre, les artistes en herbe parviennent, à force de passion et de débrouillardise, à faire éclore leur talent, à des degrés divers bien entendu, mais de telle sorte que, dans le lot, émergent quelques pépites. Contre l’adversité de l’environnement, ils arrivent, tant bien que mal, à répéter et créer. Il est certain que des mécanismes d’aide formalisés seraient les bienvenus pour prendre en charge l’amont de la création musicale. Mais, déjà, l’un des meilleurs services qui pourrait leur être rendu serait d’apporter, aux plus affirmés d’entre eux, un soutien à la promotion et la diffusion, non seulement en Algérie, mais également à l’étranger quand ils peuvent accéder au niveau international. Aider des artistes à créer sans leur assurer des débouchés consisterait, en quelque sorte, à produire de l’asphyxie.


A ce titre, il convient de souligner ici une expérience radicalement nouvelle, qui a vu cette année l’Algérie participer pour la première fois à l’un des plus des plus grands marchés consacrés aux musiques du monde : le Babel Med Music Festival, organisé chaque année à Marseille. L’édition 2011, tenue fin mars, a regroupé 2500 professionnels de la musique estampillée world (diffuseurs, programmateurs, producteurs, institutions publiques etc.) répartis sur
170 stands et abritant pas loin de 250 structures venues des quatre coins de la planète. Cet essai, qui s’est avéré concluant, a été engagé par l’AARC (Agence algérienne pour le rayonnement culturel). Au chapitre des initiatives publiques, la création en 2008 de cette institution culturelle, organisée en entreprise (EPIC), témoignerait d’une ambitieuse volonté de diffusion de la culture et des arts d’Algérie, premier jalon souhaité d’une future industrie culturelle nationale, basée sur une stratégie globale incluant les supports et canaux de production, d’information, de promotion, de protection et de mise à disposition, afin de recréer du lien entre création et consommation culturelles. De là, cette agence est appelée à générer des modèles nouveaux préservant l’exigence de qualité, l’obligation d’équité et la nécessité d’une efficacité de l’action culturelle.


Après avoir soutenu bon nombre de projets de créations et s’être engagé dans des coproductions, bien plus souvent heureuses qu’hasardeuses, l’agence a choisi de marquer sa présence à l’international par un positionnement inédit sur un marché culturel international. Cette présence a été remarquée et comprise par les professionnels étrangers pour ce qu’elle était un tournant de l’Algérie culturelle, affirmant ainsi sa volonté de promouvoir elle-même ses artistes et producteurs. En se rendant à Babel Med Music, et en occupant le stand n°1 de cet immense carrefour de la musique mondiale, l’AARC a d’abord manifesté son désir d’écouter le monde, ses langages, ses tendances, de voir de plus près comment s’articule aujourd’hui une industrie culturelle dans la déferlante d’une digitalisation sans limite, qui n’a pas fini de révéler des supports toujours plus innovants et inventifs. Cette présence s’est, de plus, construite sur une approche nouvelle, celle de l’alliance — sous l’enseigne de
l’agence — de ressources publiques et d’expertises indépendantes (quatre structures algériennes de production représentant plusieurs artistes partageaient le même espace d’exposition). Ce maillage devrait signer, entre autres procédés, l’amorce de ce modèle tant attendu et qui serait une des assises des métiers de la musique en particulier et du spectacle vivant en général.


Enfin, cette présence aura édifié sur la clarté des défis actuels surmontables par un pragmatisme éclairé, et non le repli ou le retrait qui laisse les créateurs algériens livrés aux aléas et dictats du marché international. Visibilité, lobbying, qualité sont les mots à même de guider cette agence naissante dans la poursuite des missions de «diffusion» et d’internationalisation confiées par son mandant et qu’elle mènera d’autant plus aisément que se développera le dispositif électif adéquat capable de repérer les porteurs d’initiatives innovantes et annonciatrices d’avenir. A notre sens, l’AARC a entamé un processus qui devrait l’amener à procéder au référencement de capacités, à l’animation de réseaux, à la pratique de la veille culturelle et au développement de programmes dans les musiques actuelles. Le niveau de maturation auquel est parvenu l’environnement culturel en Algérie réclame de tels catalyseurs autour de la perspective centrale de connexion entre le bien culturel et son consommateur. La semaine dernière, à la radio, un cadre de ministère établissait un lien de causalité entre le nombre d’habitants de l’Algérie et son potentiel culturel. Nul besoin d’être sociologue pour savoir que la démographie d’une population n’a jamais constitué le support à l’éclosion de vocations. De tous petits peuples ont une aura culturelle internationale bien plus forte que d’autres à populations immenses. Un poète pourrait dire que les petits ruisseaux forment les grands océans. Les ratios démographiques ou purement quantitatifs supportent une vision qui n’a jamais prévalu, ni fonctionné dans le traitement de l’art et de la culture.


Le temps de l’inventaire est dépassé pour que s’ouvre l’ère de l’efficience. Disposer d’espaces à travers les démembrements territoriaux, d’un parc d’équipements audiovisuels, de scènes nationales et internationales ne peut avoir d’intérêt que s’il existe une exploitation proportionnée gravitant autour d’attentes identifiées. Le débat n’en est plus aux moyens, mais à leur articulation et à leur mise en œuvre. Repenser la proximité, la médiation, l’accompagnement et le financement permettront de faire muter l’animation culturelle en action culturelle, étape cruciale autorisant à parler enfin d’industrie et de métiers de la culture. Et quoi de mieux que de se rendre en des contrées avancées dans ce domaine, de prendre la mesure des phénomènes et de commencer à y prendre ses marques.

Reda Chikhi. Producteur

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